– Pour les pulsions sexuelles, les modifications qui vont entraîner des destins pulsionnels différents, sont de deux ordres. Soit, il s’agit de modification de l’objet, soit d’une modification du but (principe de satisfaction).
Cela ouvre un champ des processus sexuels quasiment infinis. Le propre de ces pulsions sexuelles, c’est qu’elles n’ont aucun objet auquel elles soient originairement liées (ce sont les seules pulsions qui ont cette propriété). Aucun objet n’est prédéterminé. Parties du corps, corps entier…
– Le but : c’est la satisfaction. Ce qui va varier, c’est la manière par laquelle on va atteindre cette satisfaction, et la pluralité des étapes intermédiaires. Voir les Essais sur la théorie de la sexualité.
Ce qui permet à Freud de définir cela, c’est l’observation de l’organisation sexuelle infantile. C’est à cette occasion que se met en place la structure psychique, c’est aussi là que s’institue pour chaque sujet le « choix de sa névrose », voire de sa psychose.
Toute la problématique de l’inconscient en est tributaire historiquement. L’organisation sexuelle infantile n’est cohérente, en psychanalyse, que sous certaines conditions :
– Le dynamisme pulsionnel (pulsions sexuelles : aucun but, aucun objet fixe), la plasticité pulsionnelle.
– C’est une intégration des différents processus pulsionnels sexuels.
– L’organisation sexuelle génitale n’est qu’une étape spécifique de l’organisation sexuelle infantile. Elle n’est pas une étape achevée, c’est un cas de figure possible de la sexualité.
Tout se passe comme si les pulsions sexuelles restaient des pulsions partielles.
Une pulsion partielle est une pulsion sexuelle en place dans l’organisation sexuelle de l’enfant qui, à un moment de son histoire, se trouve définie par un objet particulier et un but particulier.
Toute l’évolution sexuelle infantile, c’est une succession du fonctionnement des différentes pulsions partielles.
A ces pulsions partielles, correspondent les objets partiels.
– Donc, les pulsions partielles sont des pulsions sexuelles dont ni le but, ni l’objet ne sont nécessairement liés à la génitalité.
– Elles fonctionnent de façon autonome.
Au-delà de l’organisation sexuelle infantile, les pulsions partielles subsistent.
Pour Freud, le stade génital constituerait le terme de cette organisation sexuelle infantile. Le stade génital se passerait donc comme si les différentes pulsions partielles qui ont fonctionné dans les stades prégénitaux trouveraient une intégration au niveau du stade génital de telle sorte que la sexualité trouverait sa satisfaction, à partir du stade génital, dans un processus génital (l’accouplement) avec un objet qui serait un partenaire de sexe opposé.
Mais cette intégration est une intégration partielle. Au-delà du stade génital, les pulsions partielles continuent à fonctionner parallèlement au processus de satisfaction génitale.
Ces pulsions partielles peuvent être considérées comme les composantes fondamentales de la sexualité.
– Elles sont déjà à l’œuvre dans ce que Freud appelle le plaisir préliminaire à l’acte sexuel. Elles sont à l’œuvre de façon permanente chez les pervers à un point tel que chez certains pervers, la satisfaction sexuelle est exclusivement assurée sur le mode des pulsions partielles).
Ces pulsions partielles ont des sources spécifiques : les zones érogènes : « régions du revêtement, cutané ou muqueux, susceptible d’être le siège d’une excitation de but sexuel » (Laplanche et Pontalis).
Les principales zones érogènes :
. La zone orale, c’est l’orifice qui est la zone érogène
. La zone anale
. La zone urétro-génitale
– Le sein.
A côté de ses zones, le corps tout entier peut fonctionner comme zone érogène.
Freud a distingué un certain nombre de stades et des pulsions. Ces stades ne sont pas définis très rigoureusement dans le temps.
a) Le stade oral primitif
b) Le stade sadique oral (cannibalique) K. Abraham
a) Le stade oral primitif (env. 0-6 mois)
C’est la succion, d’abord du sein ou du biberon, qui va s’accompagner d’une satisfaction libidinale.
La satisfaction sexuelle est solidaire de la satisfaction alimentaire. On dit que la pulsion sexuelle s’étaye sur la pulsion alimentaire (pulsion anaclitique).
La pulsion alimentaire fournit à la fois une source, une direction, un objet et un processus de satisfaction à la pulsion sexuelle.
– Ce que remarque Freud, c’est qu’au bout d’un certain temps, le besoin de répéter la satisfaction sexuelle va se séparer de la pulsion alimentaire.
Il va y avoir séparation progressive des deux processus, et dans la frustration ou dans l’attente de la satisfaction alimentaire, l’enfant va substituer un instrument de satisfaction orale. Il va élaborer un objet substitutif à l’objet alimentaire qui lui permettra, hors les pulsions alimentaires, de satisfaire néanmoins les pulsions sexuelles.
– Ces objets substitutifs sont essentiellement les doigts et le pouce (c’est le plus praticable).
En ce sens, l’enfant qui suce ses doigts ou son pouce est un enfant qui se satisfait sexuellement. On peut parler d’auto-érotisme.
b) Le stade sadique-oral, cannibalique
Ce qui va être prépondérant dans le but de la pulsion sexuelle, dans le processus de satisfaction, ça ne sera plus la succion mais la morsure.
– Ce type de satisfaction lié à la morsure serait largement favorisé par le problème de la poussée dentaire.
– Dès ce niveau-là, la satisfaction sexuelle de l’enfant va rencontrer ses premiers conflits.
Bon gré, mal gré, il faut que l’enfant apprenne à sucer, à téter sans mordre. Une tentative de morsure se solde pour lui par une frustration, c’est-à-dire le retrait immédiat de l’objet alimentaire.
Il faut que l’enfant compose. On assiste à deux états de tension psychique tout à fait opposés. D’un côté, un état de tension qui incite à mordre pour satisfaire la libido, et un autre état de tension opposé au précédent, qui incite à ne pas mordre pour éviter la frustration alimentaire.
Ces états de tension sont l’occasion pour l’enfant, d’états de rage, à la mesure de ses moyens, mais qui traduisent l’impuissance où cet enfant se trouve, à certains moments, de pouvoir continuer à satisfaire ses pulsions et alimentaires et sexuelles selon son bon vouloir.
L’enfant fait ses premières expériences sadomasochistes sur ce mode-là.
Très tôt, l’enfant est pris dans un comportement psychique qui ne cessera de se développer par la suite : l’ambivalence.
On dit que l’enfant est ambivalent dans la mesure où il existe deux tendances opposées à l’endroit d’un même objet.
Le modèle privilégié de l’ambivalence, c’est l’opposition de l’amour et de la haine.
La satisfaction des pulsions chez l’enfant à ce stade-là, c’est ce qui traduit son amour de l’objet, or cet amour pour l’objet ne peut pas s’effectuer sans une destruction de l’objet par l’intermédiaire de la morsure.
M. Klein y a vu deux possibilités d’objets pour l’enfant : le bon objet et le mauvais objet.
A ce stade oral, l’enfant est installé dans un stade fondamentalement narcissique. C’est le narcissisme primaire.
Toute la libido de l’enfant est investie sur lui-même par l’auto-érotisme. Le narcissisme secondaire est un mécanisme différent. Il se manifeste essentiellement par un retrait de la libido des différents objets au bénéfice du moi. L’objet d’amour essentiel est le moi (voir « Pour introduire le narcissisme » 1914 in La vie sexuelle).